D’où vient ce sentiment de culpabilité ? Pourquoi s’est-il infiltré dans nos vies de manière aussi profonde ? Pourquoi cette culpabilité finit par être notre seul moyen de voir la réalité ? Et surtout pourquoi sommes nous toujours obligés de désigner un coupable ?
« Pourquoi il m’arrive cela ? Qu’est ce que j’ai fait pour souffrir de cette manière ? Etc. ». Ces questions polluent notre existence et génèrent énormément d’anxiété. Car en réalité, derrière le sens que nous cherchons à donner à nos expériences s’en cache un autre. Qui est responsable de ce qui m’arrive ? Qui est le coupable ?
Alors la culpabilité se met à nous suivre partout. Elle devient même une grille de lecture de la réalité. Et elle réduit considérablement notre champ de vision. Car, ce réflexe réduit le monde à deux possibilités : soit les autres sont coupables, soit c’est moi ! Et quel que soit le coupable, il devra y avoir tôt ou tard une réparation. Alors la liste des dettes commence à s’allonger. Et en l’absence de réparation, soit nous trainons derrière nous tous nos problèmes non résolus, soit nous devons faire preuve de résilience.
La culpabilité, une vieille « amie » de toujours …
Saviez-vous que les enfants de 0 à 3 ans pensent que le monde tourne exclusivement autour d’eux ? C’est une étape naturelle dans la construction de leur personnalité. Mais, quand ça va mal dans la famille ou quand les parents sont tristes par exemple, les enfants vont aussi porter naturellement la responsabilité de ce qui se passe autour d’eux. Logique quand ils ont l’impression d’être au centre de leur monde. Imaginez alors, la dose de culpabilité que nous portons tous, sans exception. Et certaines personnes continuent de porter, encore à l’âge adulte, des tas de « dossiers » qui ne leur appartiennent pas.
“Je prends tout sur mes épaules”
Avez-vous observé à quel point nous prenons tout pour nous ? Quand il se passe quelque chose dans nos vies, le premier réflexe est de se demander : « qu’est-ce que j’ai fait pour qu’il m’arrive ça ? ». On prend à nos comptes nos échecs et nos réussites. Jusque là, c’est bien normal. Mais nous portons aussi la responsabilité de la mauvaise humeur de notre époux(se), de la tristesse de notre mère/père, de la dernière crise de colère de notre enfant, de l’annulation d’un rdv par un ami ou du refus de notre boss. Ou alors, on se positionne parfois dans la peau de la victime: « c’est toujours la même chose, quand il arrêtera de rentrer tard, je serais de meilleure humeur ».
C’est tellement lourd à porter
La culpabilité peut être tentaculaire. Elle arrive de tous les côtés. Et si on ne fait pas attention, on se retrouve vite avec une charge de milliers de tonnes sur le dos.
Déjà, nous avons une tendance naturelle, qui nous vient du passé, à porter la responsabilité de ce qui nous arrive. « Je suis seul parce que je n’ai pas d’humour et je ne m’ouvre pas assez aux autres », « Je ne trouve pas de compagnon parce que je ne suis pas assez jolie », « j’ai été agressée parce que ma jupe était trop courte », « Elle m’a quitté parce que je n’ai pas été à la hauteur. », etc.
Ensuite bien souvent, quand nous ne pouvons pas faire porter la responsabilité à l’autre (si la relation est brisée, s’il est décédé ou s’il n’admettra jamais sa responsabilité) nous pouvons parfois nous mettre à porter la responsabilité de l’autre à sa place. C’est alors le seul moyen que nous trouvons pour réparer ce qui a été vécu.
Enfin, nous pouvons aussi utiliser la culpabilité pour supporter l’insupportable. Cela devient alors une étape nécessaire pour encaisser un choc. Il faudra quand même parvenir à libérer cette culpabilité quand le moment sera venu, sinon il sera difficile de guérir. Il n’est pas rare dans des cas d’abus, de violences graves, de fausse couche ou de perte d’un proche de se sentir immédiatement coupable de ce qui vient d’arriver. Porter la responsabilité de cette perte va donner « du sens » à l’épreuve qu’on est en train de traverser. Si on se désigne comme coupable, on peut momentanément expliquer ce qui vient d’arriver. Car accepter de tels chocs de la vie est parfois impossible.
“Les 5 choses que la culpabilité gâche dans ma vie”
Je n’arrive plus à respirer, au sens propre et au sens figuré. La culpabilité agit comme une chape de plomb sur notre poitrine. Elle nous empêche de nous remplir, de prendre de l’espace, de nous détendre et d’écouter notre cœur. Elle finit même par peser physiquement sur nos épaules, notre nuque et notre dos et entraine de nombreuses tensions.
Je n’arrive plus à faire des choix. Parfois, on se sent tellement coupable d’exister qu’on n’ose même plus faire un choix de peur des conséquences que cela pourrait avoir sur les autres. On voudrait se faire transparent. Même un petit choix peut devenir une responsabilité trop grande à porter qui rajoute une charge à celle déjà sur nos épaules.
Je suis triste en permanence. Quand on porte beaucoup trop sur ses épaules et qu’on charrie des blessures qui ne nous appartiennent pas, on fini par vivre avec un nuage de tristesse autour de soi. On aimerait s’en débarrasser mais quand le nuage est trop gros, on est coincé dedans. C’est le moment de demander de l’aide. Car la culpabilité tue la gaité et l’enthousiasme et elle sabote clairement nos ressources.
Je n’arrive pas à tourner la page. Quand on rumine une rupture, un licenciement, une dispute trop longtemps, c’est utile d’aller vérifier : est-ce que je porte la culpabilité de ce qui m’est arrivé ? Souvent la réponse est oui. Nous pouvons alors regarder ce qui s’est passé de plus près, calmement et avec discernement. Avec du recul, nous pourrons prendre notre part de responsabilité et rendre à César ce qui est à César !
Je ne m’aime pas. Avec tout ce que nous nous mettons sur les épaules et en prenant la responsabilité de tout ce qui ne fonctionne pas dans notre vie… forcément, il y a de quoi ne pas aimer le « monstre » qu’on finit par voir dans le miroir. Mais en mettant de l’ordre dans nos souvenirs, en renvoyant certaines charges à leurs propriétaires et en acceptant que la Vie peut aussi nous faire grandir sans que ça soit forcément de notre faute, nous commençons à récupérer un peu d’estime pour soi et même de la gaité.
“Je passe mon temps à régler mes dettes.”
Voilà ce qui arrive quand la culpabilité s’est infiltrée partout dans nos vies. On finit par ne plus voir la fin de ce « carnet de dettes » que nous charrions partout. « Il faut que je sauve le monde entier car je n’ai pas réussi à sauver maman/papa. », « il faut que je brille dans mon métier car je n’ai pas réussi à satisfaire mes parents ou mes professeurs comme ils le souhaitaient. », « il faut que je sois discrète car quand on me voit trop je dérange », etc. La liste est sans fin et elle nous retient attaché au passé.
Quel chemin pour guérir ?
Mettez à jour votre « carnet de dettes » !
Allez, on repart du début. Avec vos yeux d’adultes, qu’est ce qui était vraiment de votre faute dans votre vécu d’enfant ? Peut-être que vous avez arraché toutes les fleurs de la voisine ou rayé la voiture de votre père. Ça ok. Et tout le reste ? Qu’est ce que vous avez pris pour vous et qui ne vous appartenait pas ?
Tout ceci, rendez-le ! Symboliquement ou réellement, en le disant, en l’écrivant ou en le criant, peu importe. Mais débarrassez-vous de ces fardeaux que vous portez et qui ne sont pas à vous !
La thérapie peut vous aider à le faire et les moyens sont nombreux : la prise conscience et la verbalisation allègent l’esprit ; La libération à travers le corps complète le travail sur soi et amène des sensations physiques de légèreté, de soulagement et de détente.
Déjà c’est une bonne partie du chemin vers la libération.
Et dans votre vie d’ado et d’adulte ?
Quelles sont vos vraies responsabilités dans ce que vous avez vécu ? Celles que vous trouverez, réparez-les si c’est possible (en écrivant un mot, en envoyant un message, en vous expliquant plus clairement, en demandant pardon) et pardonnez-vous. Vous pourrez ainsi aller de l’avant.
Quelles sont les responsabilités portées par les autres ? Elles ne doivent pas être trop nombreuses. Sinon, c’est peut être que vous êtes piégé dans le rôle de la victime. Demandez réparation quand c’est possible, et surtout, exprimez votre souffrance. Souvent les autres ne se rendent pas compte de ce qui vous a blessé. Vous recevrez de nombreux pardons en exprimant vos blessures.
Et n’oubliez pas que la plupart du temps, c’est juste la Vie qui est à l’œuvre. Et dans bien des cas, vous n’êtes pas responsable de ce qui vous arrive. C’est la Vie qui décide… et elle a son lot de surprises, les bonnes et les moins bonnes.
Soyez confiant, la Vie a ses raisons que la raison ignore 😉
Et n’oubliez pas que parfois, on comprend le sens d’une action ou d’un événement dans notre vie que 10 ans après l’avoir vécu. Des fois, une action ne semble avoir aucun sens. Et pourtant, 10 ans après, quand nous faisons le point sur notre situation, nous nous rendrons compte que sans cela nous n’en serions pas là où nous en sommes aujourd’hui. Merci la vie 😀